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Perspectives pour les calculs Monte Carlo Quantique

Dans les chapitres précedents nous avons utilisé les orbitales localisées pour calculer des énergies de corrélation et décrire de façon approchée les effets quantiques sur des interactions locales. L'expression ``croissance linéaire'' (linear scaling) est utilisé fréquemment pourqualifier la complexité numérique attendue avec orbitales localisées. Pour les calculs de type Monte-Carlo l'économie du calcul est également importante, d'autant que la durée d'un calcul n'est plus fixée seulement par la taille du problème, mais aussi par le nombre des marcheurs (trajectoires ou configurations) indépendants et le nombre de leurs pas dans une échantillonnage statistique. Un calcul plus rapide du pas de chaque marcheur permet d'augmenter la précision globale du calcul Monte Carlo qui est proportionnelle à la racine carrée du nombre de tirages indépendants. Ainsi faut il quadrupler le temps de calcul pour doubler la précision.

L'élément central d'un calcul Monte Carlo Quantique est le calcul de la valeur moyenne d'un opérateur sur la fonction d'onde. Cette dernière est généralement écrite comme un produit d'un préfacteur exponentiel dit de Jastrow décrivqnt explicitement la corrélation électronique puis d'une partie déterminantale calculée à partir des orbitales moléculaires :

\begin{displaymath}
\Psi(\vec{\rm r}_1, \ldots, \vec{\rm r}_n) = e^{\sum_{ij} f(...
...& \cdots & \phi_n(\vec{\rm r}_n) \cr}
\right\vert _K \qquad .
\end{displaymath} (28)

Il y a deux possibilités intéressantes d'introduire des orbitales localisées :

Ici nous examinons que la première possibilité d'exploiter la localisation des orbitales, la deuxième étant relativement facile à mettre en place[#!Luchow!#] grâce à des bibliothèques de programmes comme SPARSE ou UMFPACK, qui sont librement accessibles.

L'énergie totale est calculée par des méthodes Monte-Carlo Quantique à partir d'une une énergie locale $E_L({\bf x})$ par


\begin{displaymath}
\langle E \rangle =
{{\int \Psi({\bf x}) {\bf H} \Psi({\bf...
...)
d{\bf x}}\over{\int \left[\Psi({\bf x})\right]^2 d{\bf x}}}
\end{displaymath} (29)

avec une distribution de probabilité donné par $\left[\Psi({\bf x})\right]^2$. Les positions des électrons evoluent à partir d'un choix initial d'une configuration x à une autre x' avec des probabilités de transition obéissant à la condition de la balance détaillée d'après l'algorithme de Metropolis et al.[#!Metropolis!#] :

\begin{displaymath}
{\cal{P}}({\bf x}\rightarrow {\bf x'}) = {\text{min}}\left...
...\Psi({\bf x'})}\over{\Psi({\bf x})}}\right]^2 \right) \qquad .
\end{displaymath} (30)

Un tel échantillonage distribue les configurations x (en moyenne, à long terme) selon la densité électronique $\left[\Psi({\bf x})\right]^2$. A chaque pas l'énergie locale est évaluée, amenant à la moyenne
\begin{displaymath}
\langle E\rangle = {1\over N}  \sum_{i=1}^N E_L({\bf x}_i) \qquad .
\end{displaymath} (31)

Si $\Psi({\bf x})$ était fonction propre de H, la valeur propre correspondante de l'équation de Schrödinger donnerait une valeur unique de l'énergie locale pour toute configuration des électrons. Sinon, l'énergie totale de l'équation 29 est minimisée en recherchant des expressions et des paramètres optimaux, soit du facteur de Jastrow et de la fonction de corrélation $f(\vec{\rm r}_i,\vec{\rm r}_j)$, soit des paramètres des orbitales en utilisant les orbitales Hartree-Fock, puis les orbitales naturelles d'un calcul d'IC. On peut aussi utiliser des fonctions d'ondes multidéterminantales corrélées, issues des calculs MCSCF, (G)VB ou d'un IC.

Si l'on veut utiliser des fonctions d'onde corrélées, la localisation permet de condenser les expansions en déterminants, comme nous l'avons demontré dans le premier chapitre. Il est utile de rappeler que ces fonctions d'onde sont toujours des fonctions dans l'espace engendré par le déterminant de référence et ses mono- et di-excités. Les sommation infinies introduites dans le premier chapitre améliorent l'énergie totale vers des calculs CCSD(T), mais la fonction d'onde reste toujours limitée aux di-excitées.

L'équation 29 et l'expression de la probabilité de transition (éq. 30) montrent que ni la normation ni l'orthogonalisation ne sont nécessaires pour la fonction d'onde $\Psi$, puisque d'une part la norme intervient dans l'expression de l'énergie et d'autre part la partie du déterminant de la fonction d'onde absorbe toute partie de recouvrement des orbitales.

Or les localisations de type Pipek-Mezey ou Boys donnent des orbitales localisées orthogonales, car les optimisations de fonctionnelles se font par des rotations 2$\times$2, qui ne changent pas les angles entre les vecteurs. La généralisation de la minimisation sans la contrainte d'orthogonalisation, donné par Liu et al[#!Liu!#] pour le cas de la localisation de Boys, pourrait ouvrir une alternative en gardant l'optimisation d'une fonctionnelle de localisation.

Notre but est ici de construire des déterminants en orbitales localisées, non-orthogonales, en utilisant les fonctions d'onde d'un calcul de perturbation ou d'un IC, voire CEPA-0. Les résultats que je vais présenter n'ont pas encore été exploités par un calcul Monte-Carlo Quantique; il s'agit encore d'une étape préparatoire. Nous verrons par la suite l'importance d'une analyse détaillée de cette étape.

La projection à partir de la moitié de la matrice densité à une particule est une méthode relativement directe de construction d'orbitales localisées.[#!Chambaud!#,#!RamirezSolis!#] Les orbitales atomiques étant bien localisées dans l'espace, cette procédure de projection donne des vecteurs le moins délocalisées possibles, sans contrainte de produire des orbitales orthogonales. Pour l'instant nous ne prenons que le déterminant Hartree-Fock, car si nous savons exploiter la localisation pour un déterminant, nous pouvons généraliser la procédure pour une expansion multi-déterminantale, donnant ainsi des coeffcients d'orbitales optimales pour chaque état inclu dans la fonction d'onde.

La projection utilise la matrice densité et la matrice de recouvrement pour exprimer le projecteur $\Pi$ sur l'espace des orbitales occupées :

\begin{displaymath}
\vert\tilde{\chi}_{\alpha} \rangle  = \Pi \vert\chi_{\alp...
... {\bf P}{\bf S}\right)_{\beta\alpha}
\vert\chi_{\beta}\rangle
\end{displaymath} (32)

La projection sur le complément de $\Pi$, $\Pi' = {\bf 1} - {\bf PS}$ donne les orbitales virtuelles, les plus localisées possibles, comme l'ont proposé Pulay et al..[#!Boughton!#] Cette construction de l'espace virtuel est implementé dans le programme MOLPRO, [#!Hampel!#] avec un critère de sélection des orbitales : les orbitales virtuelles projetées autour d'une orbitale occupée sont retenues, limitant ainsi le nombre d'orbitales virtuelles et évitant des bases sur-complètes. Dans l'approche Monte-Carlo seules les orbitales occupées de chaque déterminant sont nécessaires, tandis que la construction de l'espace des orbitales virtuelles, importantes dans les méthodes post Hartree-Fock ``classiques'' telles que perturbation ou IC est inutile.

La projection des orbitales atomiques sur l'espace des orbitales occupées donne le même nombre de projections que d'orbitales atomiques -- il faut choisir maintenant $N_{occ}$ projections sans dépendance linéaire. Pour cela, les projections sont d'abord rangées selon un critère de localisation à définir, et la première, la plus localisée, est retenue comme fonction de départ. Le passage de $N$ à $N+1$ projections se fait par la procédure suivante : la première de la liste des projections non encore utilisées est ajoutée aux $N$ projections déjà sélectionnées. Les valeurs propres de la matrice des recouvrements des $N+1$ projections sont calculées ensuite. Si la plus petite valeur propre est supérieur à un seuil choisi auparavant, la projection ajoutée est retenue; sinon elle est rejetée et la projection suivante de la liste est prise. A la fin il y a deux possibilités : soit nous avons trouvé $N_{occ}$ projections sans dépendances linéaires, soit le seuil choisi pour décider s'il y a ou non une dépendance linéaire était trop grand et nous devrons recommencer la procédure avec un seuil plus petit. La reprise est facilement possible car les projections n'ont pas été changées par la sélection.

Un critère de localisation est obtenu en attribuant à chaque orbitale moléculaire un nombre égal à la somme des valeurs absolues des coefficients, divisé par les coefficient le plus grand :


\begin{displaymath}
s_i  =  {{1}\over{{\rm max}_\alpha(c_{\alpha i})}}  \sum_{\alpha}
\vert c_{\alpha i}\vert \qquad .
\end{displaymath} (33)

Pour une orbitale délocalisée sur deux centres $\phi=\chi_1\pm\chi_2$ nous trouvons ainsi $s=2$, et pour une orbitale parfaitement localisée sur un seul centre ($\phi=\chi_1$ ou $\chi_2$) $s=1$. Toute autre orbitale aura une valeur $s$ entre ces deux limites.

Nous examinons maintenant plusieurs systèmes : avec des orbitales canoniques, des orbitales localisées par les méthodes de Boys et de Pipek-Mezey, et localisées par la méthode des projections que l'on vient de décrire. Les orbitales obtenues par projections peuvent être orthogonalisées entre elles, ce qui donne une mesure des délocalisations par l'orthogonalisation (les queues d'orthogonalisation). Nous utilisons l'orthogonalisation symétrique par S$^{-1/2}$.

Le premier exemple considéré est une chaîne d'atomes d'hydrogène relativement longue en base minimale, avec des distances interatomiques alternées de $r$ et $2r$, avec $r=0.7474 $Å (voir section IIIB2). En base minimale, avec une orbitale atomique par atome, nous pouvons visualiser facilement la taille des coefficients de chaque orbitale moléculaire.

Pour des bases comprenant plusieurs orbitales atomiques par centre, une analyse statistique de la taille des coefficients des OA dans les OM peut révéler le degré de localisation des orbitales moléculaires. Si de simples dessins de contours avec échelle logarithmique montrent des détails par orbitale dans l'espace réel, ils ne montrent pas le nombre d'opérations à effectuer pour évaluer l'orbitale moléculaire comme produit de coefficients et de fonctions atomiques.

L'analyse statistique trouve le nombre de coefficients de chaque ordre de grandeur et un diagramme cumulatif qui indique le nombre de coefficients -- au dessus d'un seuil à définir -- à retenir pour le calcul explicite de la fonction d'onde $\Psi$.

Ces deux analyses (coefficients explicites et analyse statistique) sont présentées dans la figure 25. La partie gauche présente des valeurs absolues des coefficients de l'orbitale ``centrée'' sur l'extrémité de la chaîne et montre ainsi la décroissance exponentielle de l'orbitale dans l'espace. Les orbitales non-orthogonales, obtenues par projection, sont désormais nommées ``extrême''; ``extrême, orth'' désigne leurs correspondants orthogonalisées par S$^{-1/2}$. Étonnament les orbitales Boys, Pipek-Mezey et celles obtenues par projection ont exactement la même décroissance exponentielle. L'orthogonalisation a posteriori des orbitales ``extrêmes'' délocalise davantage les orbitales que les procédures Boys et Pipek-Mezey qui conservent l'orthogonalité des orbitales canoniques.

La partie droite (symboles creux) montre le nombre des coefficients de toutes les orbitales occupées par ordre de grandeur, tandis que les symboles pleins donnent les cumulatifs, par ordre de grandeur. L'ensemble de toutes les orbitales occupées montre, comme l'orbitale centrée sur l'extrémité, que les localisations par la procédure de Boys et par projections ont le même ordre de délocalisation générale.

Figure 25: Coefficients des orbitales occupées de la chaîne de 56 atomes d'hydrogène en base minimale.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =5.5 true cm
\epsffile {FigH56.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

Nous admettons que la flexibilité des orbitales en base minimale n'est pas très grande, même si l'hamiltonien correct non-relativiste est utilisé dans ce modèle simple.

Que se passe-t-il en agrandissant la base atomique? Le nombre d'orbitales moléculaires occupées est le même. Par contre la densité moléculaire est de mieux en mieux représentée, permettant des polarisations des atomes ``dans la molécule''. Ceci entraîne un grand nombre de coefficients relativement petits dans les expansions des orbitales moléculaires en orbitales atomiques.

D'autre part, la plupart des fonctions de polarisation ne contribue pas à la fonction d'onde parce qu'elles sont d'une symétrie spatiale différente.

Pour limiter l'effort calculatoire nous nous contentons d'une chaîne de 18 atomes d'hydrogène comme exemple.

Figure 26: La même analyse statistique, maintenant dans des bases différentes et pour un chaîne de 18 atomes d'hydrogène. Il s'agit d'une base minimale (18 OA, 1s par atome), une base DZP (90 OA, 31/1), une base cc-pvtz (162 OA, 311/11 par atome) et une grande base avec des orbitales $d$ (306 OA, 511/11/1).
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =9 true cm
\epsffile {analyse_h18.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

Dans ce cas le nombre total de coefficients possibles pour l'ensemble des orbitales occupées est de 9$\times$N$_{OA}$. La symétrie réduit largement le nombre d'orbitales atomiques utilisées : parmi les trois orbitales $p$ seule la $p_x$ a la symétrie de la fonction d'onde tandis que pour les $d$ seules $d_{x^2-y^2}$ et $d_{3z^2-r^2}$ utilisées.

Or dans une expansion en déterminants d'une fonction d'onde d'un IC, ces orbitales atomiques non utilisées dans la solution Hartree-Fock peuvent bien contribuer via des diexcitations, dont le produit direct des réprésentations irrductibles des orbitales occupées a la même symétrie que l'état fondamental.

Concernant les localisations différentes nous obtenons plusieurs résultats en augmentant la base. En base minimale, les localisations Boys, Pipek-Mezey et ``extrême'' par projection montrent à peu près la même repartition de taille des coefficients comme l'indiquait la figure 25. En ajoutant des fonctions de polarisation, les orbitales canoniques aussi ont également des petits coefficients sur ces fonctions, comme les orbitales localisées. La différence en nombre de coefficients importants entre orbitales localisées et orbitales canoniques disparaît quasiment pour la base la plus grande utilisée. En ne sélectionnant que les coefficients plus grand que 10$^{-3}$, la localisation de Boys donne toujours des orbitales aussi localisées que la projection avec orbitales non-orthogonales. Avec des coefficients un peu plus grands, jusqu'à 10$^{-2}$, la méthode des projections donne le nombre de coefficients le plus bas.

Orthogonaliser les orbitales extrêmes donne, semble-t-il, des orbitales plus délocalisées que de orbitales orthogonales de Boys ou Pipek-Mezey. Encore une fois, les différences deviennent de plus en plus petites avec l'augmentation des bases atomiques.

Nous voyons alors dans cet exemple que la localisation par projection n'a pas d'avantage évident par rapport aux autres localisations, celles de Boys ou Pipek-Mezey. Dans les super-molécules d'hydrogène, la densité électronique est très faible. Or la localisation mélange les orbitales en conservant la densité totale de la molécule, ce qui ne laisse plus beaucoup de flexilibilité aux orbitales occupées.

Par contre pour des molécules plus riches en électrons, avec des liaisons mêmes multiples, la localisation par projection sans condition d'orthogonalité devrait amener à des orbitales bien plus localisées que les méthodes Boys ou Pipek-Mezey qui préservent l'orthonormalité.

Un exemple d'une bonne taille peut être la molécule C$_6$H$_8$ ((1,3,5)hexatriène) -- elle est étudiée dans la littérature dans le contexte de la réaction de cyclisation par l'équilibre hexatriène $\leftrightarrow$ cyclohexadiène.[#!hexatriene!#] L'état fondamental de cette molécule est de symétrie C$_{\rm 2h}$ et à couches fermées. La présence de liaisons conjugées a pour conséquence l'existence d'une multitude d'états excités ( $\pi\rightarrow \pi^{\ast}$), qui rend le calcul de l'énergie de corrélation, voire la spectroscopie théorique de cette molécule, relativement délicat.

Figure 27: C$_6$H$_8$ (trans-1,3,5-hexatriène avec 44 électrons) dans une structure idéale avec des angles de 120$^{\rm o}$ et des distances C-H de 108$ $pm, C=C de 134$ $pm et C-C de 147$ $pm. Le melange entre orbitales $\sigma $ et $\pi $ par la méthode de Boys est clairement visible comme nombre supérieur de coefficients à utiliser dans l'expansion des OM. La base des OA est composée de 108 fonctions, 62111/411 sur C et 311 sur H. Comme avant les symboles creuses donnent les nombres de coefficients pour l'ordre de grandeur et les symboles pleins donnent les valeurs cumlatives.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =5 true cm
\epsffile {C6H8.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

La localisation extrême, comme prévu, entraîne une réduction significative des coefficients de grande taille : environ 250 coefficients ont des valeurs absolues comprises entre 0.1 et 1.0, tandis que pour les autres localisations, Boys, Pipek-Mezey et la localisation par projection après orthogonalisation le nombre de coefficients de cet ordre de grandeur est doublé voire triplé. Les orbitales canoniques ont même cinq fois plus de coefficients supérieurs à 0.1. Si on prend les coefficients plus grands que 10$^{-4}$ l'avantage des orbitales non-orthogonales est moins évident : toutes les méthodes demandent d'évaluer grosso modo 1800 coefficients d'orbitales, à l'exception de la localisation de Boys pour laquelle l'expansion d'orbitales en 200 orbitales atomiques supplémentaires. Ceci est une conséquence directe de l'absence de la séparation $\sigma-\pi$ dans cette méthode. Au lieu de produire une orbitale $\sigma $ et une orbitale $\pi $ séparément avec un coefficient important sur les OA de symétrie $s$ et $p$ chacune, il y a deux combinaisons linéaires demandant deux coefficients pour former $\alpha_1 s + \beta_1 p$ et $\alpha_2 s +
\beta_2 p$. Dans cet exemple simple il y a donc quatre coefficients importants au lieu de deux.

L'analyse statistique présentée ici est indépendente de toute notion de distance entre orbitales atomiques ou moléculaires, seule la répartition des tailles de coefficients est affichée. Or, dans les configurations à échantillonner dans le calcul Monte Carlo les électrons se déplacent principalement dans les régions de grande densité électronique, et ils sont rarement dans les petites queues loin du barycentre d'une orbitale localisée. En introduisant une fonction d'une forme de chapeau ou cloche autour du barycentre de chaque orbitale moléculaire avant l'analyse statistique, nous pouvons supprimer l'évaluation de petites queues. Par contre au voisinage du barycentre l'orbitale moléculaire est toujours évaluée avec grande précision.

Essayons la possibilité suivante : les coefficients plus grands que 0.01 des orbitales normées sont gardés, mais les coefficients plus petits sont multipliés (pour l'analyse) par une fonction exponentielle de la distance entre le barycentre de l'orbitale moléculaire ($\vec{\rm R}_i$) et le centre de l'orbitale atomique $\vec{\rm R}_{\alpha}$ :


\begin{displaymath}
c_{\alpha i} \longrightarrow c_{\alpha i}\
{\text{exp}}\le...
...ec{\rm R}_i-\vec{\rm R}_{\alpha}\vert^2}\over{\tau^2}}\right)
\end{displaymath} (34)

avec un facteur d'échelle $\tau$. $\tau=0.5 $u.a. semble être une bonne valeur, mettant l'échelle globale à env. 1$ $Å. On peut également penser à des rayons van der Waals et définir des facteurs d'échelle individuels pour chaque atome, ou même séparer orbitales de c\oeur et de valence. Pour l'instant nous présentons des analyses pour une fonction gaussienne globale.

Figure 28: L'analyse statistique après modulation par la fonction gaussienne. Même signification pour symboles creuses et pleins.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =6 true cm
\epsffile {analpon.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

Figure 28 montre l'effet de cette analyse statistique pondérée dans l'exemple du hexatriène. Ajoutons que nous définissons ainsi un seuil pour décider quels coefficients des orbitales moléculaires peuvent être négligés sans introduire d'erreurs sensibles. Pour le calcul Monte Carlo les coefficients $c_{\alpha i}$ sont utilisés, pas les coefficients pondérés.

La localisation des orbitales se fait remarquer maintenant puisque les orbitales canoniques ne semblent plus mieux localisées que les orbitales Boys de la figure 27. Nous voyons aussi qu'après coupure des contributions à petits coefficients et loin du centre les localisations de Pipek-Mezey et par projection deviennent similaires en nombre de coefficients à retenir et à évaluer.

Le résultat global concernant les queues d'orthogonalisation est toujours le même : l'orthogonalisation intrinsèque ne pénalise la localisation au delà de quelques pourcents, par contre l'orthogonalisation après projection délocalise les orbitales.

Considérons maintenant une molécules un peu plus grande, la porphyrine sous sa forme ``base libre'' : cette molécule est consitutée d'élements legers, H, C, et N, avec des délocalisations aromatiques dans les quatre groupes de pyrrole.

Figure 29: La molécule de porphyrine avec la formule brute N$_4$C$_{20}$H$_{14}$ et 162 électrons dans une géométrie plane. A droit nous donnons les deux structures Lewis extrêmes de la résonance du système $\pi $.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =5 true cm
\epsffile {porphyrine.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

Cette molécule présente un interêt biologique car elle est l'unité centrale de l'hémoglobine (le porteur d'oxygène dans le sang). Elle est étudiée actuellement par des méthodes Monte-Carlo Quantique dans le groupe de W. Lester à Berkeley (Californie).[#!Aspuru!#]

Nous nous attendons à des résultats semblables à ceux du 1,3,5-hexatriène, avec séparation $\sigma-\pi$ caractérisée par le nombre élevé de coefficients orbitalaires dans le cas de la localisation de Boys. La repartition des électrons dans les anneaux ou les ramifications pourrait introduire plus de contraintes d'orthogonalité que dans une molécule linéaire comme le hexatriène. Par conséquent, la localisation sans orthogonalité peut être plus avantageuse.

Le calcul a été effectué avec les mêmes bases que pour C$_6$H$_8$ : une base 62111/411 pour C et N et 311 pour H, soit en total 378 orbitales atomiques pour la porphyrine.

La localisation de Boys implique 1,5 fois plus d'orbitales atomiques dans les expansions des OM que les autres méthodes, les orbitales canoniques y comprises. La repartition des tailles de coefficients est similaire à celle de la hexatriène, à l'exception de la valeur à 10$^{-3}$, pour laquelle les orbitales non-orthogonales par projection demandent maintenant le moins de coefficients dans le développement.

Figure 30: Analyse statistique des coefficients des orbitales occupées de la molécule de porphyrine. A gauche nous montrons l'analyse simple, tandis qu'à droite l'analyse pondérée est représentée. Le nombre total de coefficients est de 30618.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =5 true cm
\epsffile {porph_analyse.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

L'analyse pondérée montre l'interêt des orbitales projétées dans ce cas d'une grande molécule : le nombre de coefficients à évaluer est faible et représente la moitié de celui nécessité par la localisation Pipek-Mezey. Reste à savoir quel est l'impact sur l'énergie; le tableau IX analyse les conséquences sur l'énergie totale de la troncation des orbitales. Il apparait clairement qu'une bonne convergence est conservée lorsque les petits coefficients sont négligés. Ceci est en accord avec l'idée que les contributions à l'énergie ont un ordre de grandeur voisin du carré des petits coefficients.

La convergence est beaucoup moins bonne en annulant les coefficients moyensqui correspondent à des des orbitales atomiques centrées loin du barycentre de l'orbitale moléculaire. L'orbitale 1s d'un atome de carbone par exemple interagit (faiblement) avec l'orbitale 1s d'un atome voisin, provoquant peut-être un coefficient de développement de 10$^{-3}$ ou $10^{-4}$. En négligeant cette petite contribution à zéro, la conséquence sur l'énergie peut être relativement grande, puisque les orbitales de c\oeur sont responsables de la plus grande partie de l'énergie totale. Nous avons donc gardées des petites corrections ``sur place'', responsables de la bonne forme de l'orbitale autour de son barycentre.

Bien que cette convergence soit moins rapide que pour l'analyse simple avec seulement 8$ $% de coefficients non-nuls, l'énergie totale est calculée à 1$ $u.a. près, tandis que l'utilisation de l'analyse simple entraîne une erreur d'env. 20$ $u.a. sur l'énergie Hartree-Fock en utilisant 30$ $% (localisation Pipek-Mezey) ou 13$ $% (localisation par projection) des coefficients non nuls.

Il est à esperer que l'erreur introduite par les coupures des orbitales peut être compensée par l'introduction du facteur de Jastrow et la méthode Diffusion Monte Carlo.


\begin{displaymath}
% latex2html id marker 4410\begin{minipage}{16 true cm}
\b...
...$983.05075 & 0.03324 \\
\end{tabular}\end{table}\end{minipage}\end{displaymath}

Les densités de ces deux molécules (hexatriène et porphyrine) sont relativement homogènes à en raison de la délocalisation. Par conséquent, les orbitales occupées et les orbitales vituelles ne sont séparées que par une petite différence d'énergie. Or, la localisation des orbitales doit être difficile dès le début, comme l'a démontré W.Kohn pour des systèmes périodiques unidimensionnels.[#!Kohngap!#] Dans un système périodique une fonction de Wannier, qui est l'équivalent d'une orbitale localisée dans une molécule linéaire ou cyclique, ne montre une décroissance exponentielle qu'avec un exposant proportionel à la difference d'énergie entre orbitales occupées et virtuelles. Notre intention de chercher des molécules avec des fortes densités électroniques de valence nous a mis peut-être sur une mauvaise piste, en regardant des molécules d'un interêt photochimique -- c'est à dire avec un spectre d'excitations de faible énergie.

Néanmoins l'analyse pondérée nous a déjà permis de recalculer l'énergie Hartree-Fock de la porphyrine qu'avec un nombre faible de coefficients non-nuls.

Pour conclure nous appliquons les mêmes analyses à des molécules beaucoup plus favorables à la localisation par projection : des molécules saturées dans lesquelles les conceptes de liaisons formées par paires d'électrons distantes et séparables sont davantage respectés. La figure 31 montre alors les résultats pour deux hydrocarbures simples, idéalisées, sans ramifications. Les angles sont les angles des tetraèdres parfaits, et il n'y a que deux longueurs de liaisons : 108$ $pm pour une liaison C-H et 154$ $pm pour une liaison C-C.

Figure 31: Analyse pondérée pour deux hydrocarbures saturées, C$_8$H$_{18}$ et C$_{11}$H$_{24}$, dans une base relativement petite, 6-31G.
\begin{figure}
\begin{displaymath}\vbox{\hfil\hskip -1 true cm\epsfysize =4.5 true cm
\epsffile {saturatedp.eps}\hfill}\end{displaymath} \end{figure}

Dans cette figure nous remarquons clairement les effets attendus de la localisation. Les localisations de Boys et de Pipek-Mezey donnent à peu près les mêmes repartitions des tailles des coefficients, bien en dessus du nombre de coefficients de taille égale de la localisation par projection. Ceci montre que dans ce cas de molécules saturées les deux méthodes sont à peu près équivalentes.


\begin{displaymath}
% latex2html id marker 4426\begin{minipage}{16 true cm}
\b...
...$430.28873 & 0.06502 \\
\end{tabular}\end{table}\end{minipage}\end{displaymath}

Pour la molécule C$_{11}$H$_{24}$ nous arrivons alors à calculer l'énergie totale à env. 50$ $mH près avec seulement 13% de coefficients non-nuls, ce qui montre encore un fois la possibilité d'utiliser des localisations d'orbitales dans les méthode Monte Carlo.

La procédure décrite au début de ce chapitre est appelé Monte Carlo Quantique variationnel et vise à optimiser une fonction d'onde inaccessible par des moyen de la chimie quantique traditionnelle faute de la possibilité dévaluer les integrales $\langle\Psi\vert{\bf H}\vert\Psi\rangle$ analytiquement. L'énergie obtenue est celle de l'équation 29. Il est possible d'obtenir une équation de diffusion à partir de l'équation de Schrödinger en projettant sur des temps imaginaires. La résolution de cette équation permet de calculer l'énergie ``quasi exacte'' de l'état fondamental du système sans qu'on ait besoin de connaître explicitement cet état fondamental ou sa fonction d'onde.

Cette variante de méthode Monte-Carlo, appellée ``Diffusion Monte Carlo'', serait une méthode de choix, si elle n'avait un petit défaut : la fonction d'onde $\Psi$ change le signe en échangeant deux électrons. Or, pour une moyenne stable, l'échantillonnage doit se faire dans une ``pochette'' dans l'espace des 3$n$ coordonnées des $n$ électrons d'un système, où la fonction d'onde exacte garde son signe. Malheureusement, la seule information sur le signe global de $\Psi$ nous parvient par la partie déterminantale de la fonction d'essai, dans notre cas le déterminant Hartree-Fock. En localisant les orbitales de ce déterminant, et en négligeant des petits coefficients des orbitales moléculaires, les n\oeuds de la fonctoin d'onde seront alors legèrement déplacés. Il y aura, par conséquent, concurrence entre la bonne méthode (DMC) censée produire une énergie exacte à partir d'une fonction d'essai approximative, et l'erreur des n\oeuds fixés par cette fonction d'essai.

Dans un article recent[#!Grossman!#] J. Grossman a montré que cette erreur des n\oeuds fixés est responsable d'erreurs sur les énergies de formations calculées par DMC au même ordre de grandeur que celles des calculs de chimie quantique traditionnelle, même si la méthode est censée d'attendre une précision arbitraire, limitée uniquement par le temps de calcul et la loi des grands nombres qui implique que l'erreur statistique diminue comme l'inverse de la racine carrée du nombre des tirages indépendants.


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Peter Reinhardt 2004-10-05