L'Astate, une Chimie Relativiste

N. Galland et G. Montavon
CEISAM, Université de Nantes, Nantes, France.
SUBATECH, IN2P3/EMN Nantes, Université de Nantes, Nantes, France.

Lundi 9 Décembre 2013, 14h00
bibliothèque LCT, tour 12 - 13, 4e étage

L'astate (At, Z=85: [Xe]4f145d106s26p5) est le dernier élément naturel du groupe des halogènes. L'un de ses isotopes, 211At, est d'un intérêt majeur comme agent thérapeutique en médecine nucléaire en raison de l'énergie des particules α émises et de sa période (7,2 h).1 Cependant les caractéristiques de ce radioélément font qu'il est extrêmement difficile pour les expérimentateurs d'étudier sa chimie, ce qui n'a été reconnu que récemment indispensable pour le développement de radiopharmaceutiques.2 211At fait l'objet d'un vaste programme de recherche démarré en 2004 dans le cadre du Cancéropôle Grand Ouest et matérialisé par l'installation à Nantes du cyclotron ARRONAX. Généralement, At est supposé se comporter comme un halogène mais il présente également un caractère métallique illustré par la présence en solution aqueuse des espèces cationiques At+ et AtO+.3 L'originalité de notre approche est de chercher à utiliser les propriétés de complexation des formes cationiques de l'astate pour assurer le marquage des biomolécules.
Le nombre d'études portant sur les propriétés métalliques de At est à ce jour très limité. Cela tient au fait que ce radioélément est peu disponible (production par réaction nucléaire dans des cyclotrons à hautes énergies) et « invisible » (aucune technique spectroscopique n'est applicable pour caractériser les espèces formées du fait des faibles quantités manipulées, ~10-11 mol/L). La modélisation moléculaire apparait alors comme le principal outil pour sonder la chimie de At à l'échelle moléculaire.4,5 Toutefois, même à des questions simples (comment et avec quoi réagit l'astate ? quelles sont les espèces formées ? quelle est alors la nature des liaisons formées, covalente, simple, double, dative ...), les réponses sont difficiles à apporter. L'importance des effets relativistes, en particulier du couplage spin-orbite (SOC), et des effets de la solvatation sur la chimie de At sera discutée.

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[1] M.R. Zaloutsky et al., J. Nucl. Med. 49 30 (2008)
[2] D. S. Wilbur, Nat. Chem. 5 246 (2013)
[3] J. Champion et al., J. Phys. Chem. A 114 576 (2010)
[4] J. Champion et al., Phys. Chem. Chem. Phys. 13 14984 (2011)
[5] J. Pilmé et al., J. Chem. Theory Comput. 8 2985 (2012)